Édito – Réparer l’échelon brisé

Édito – Réparer l’échelon brisé

Comment pouvons-nous nous hisser au sommet de l’entreprise quand un des échelons est brisé?

Pour se rendre en haut de l’échelle, il y a toute une montée. D’abord, il faut commencer quelque part. Certes, on peut parler des raisons qui freinent notre ascension comme les préjugés à l’embauche et le manque de débouchés, mais qu’en est-il de la difficulté, pour les femmes, de gravir ne serait-ce que le premier échelon?

Dans une étude menée par McKinsey & Company en 2022 sur les femmes dans le milieu du travail, on apprend qu’un échelon brisé tout en bas de l’échelle empêche les femmes de progresser. Pour 100 hommes promus d’un poste d’entrée à un poste de direction, seules 87 femmes obtiendront la même promotion. Chez les femmes de couleur, il n’y en aura que 82. Selon une autre étude, les femmes demandent des promotions et des augmentations de salaire aussi souvent que les hommes, mais sont toujours promues moins vite et moins bien rémunérées que les hommes. Chez les femmes de couleur, sans surprise, l’écart est encore plus prononcé!

Dans Forbes, on compare cet échelon brisé à un angle mort du monde des affaires. Ce dernier cherche plutôt à propulser la carrière des femmes qui ont déjà atteint les échelons supérieurs en raison des années à parler du plafond de verre — cette barrière invisible à laquelle les femmes qui cherchent à se joindre aux rangs les plus élevés des entreprises finissent invariablement par se heurter. Or, dans les faits, les femmes sont désavantagées dès la ligne de départ de leur carrière et elles ne rattrapent jamais le peloton.

Les femmes auront beau s’exprimer et nourrir leurs propres ambitions, elles n’arriveront au sommet que si la parité devient une valeur clé qui influence la culture, l’embauche et les politiques de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI). Si nos entreprises ne prennent pas les mesures nécessaires, elles perdront leur bassin actuel de dirigeantes et s’alièneront les dirigeantes de demain. 

L’étude de McKinsey & Company est claire. Les facteurs qui incitent les dirigeantes actuelles à quitter leur entreprise ont encore plus d’importance pour la prochaine génération. En effet, plus de deux tiers des femmes de moins de 30 ans veulent devenir de hautes dirigeantes. Elles sont également plus nombreuses à accorder une grande importance à la flexibilité et aux engagements de l’entreprise en matière de bien-être et de DEI.

Il est temps de réparer l’échelon brisé et de faire en sorte que les femmes puissent monter l’échelle de leur ambition. Il faut que employeurs et employé·es collaborent pour y arriver et ce, sur plusieurs aspects de l’organisation.

Il importe d’évaluer chaque membre de l’entreprise, peu importe son identité de genre, selon les mêmes critères. Et si on embauchait pour la passion et on misait sur la formation pour les compétences? À l’heure actuelle, les critères du processus d’embauche et de promotion ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Alors que les hommes sont embauchés et promus en fonction de leur potentiel, les femmes se hissent dans l’échelle en fonction de leurs accomplissements. Par conséquent, dans les postes d’entrée où les gens ont moins d’expérience, les femmes se font souvent faucher l’herbe sous le pied.

Il faudrait donc revoir le processus d’évaluation et de promotion afin de s’assurer que tout le monde soit évalué selon les mêmes critères. De plus, il faudrait aussi éduquer les cadres quant aux répercussions possibles de leurs biais inconscients sur leurs décisions en tant que leader.

Pour que les femmes aient accès aux mêmes débouchés que les hommes, il faut leur donner accès aux outils de perfectionnement, aux programmes et aux personnes qui activeront leur réussite. Dans l’état actuel des choses, les femmes ne reçoivent même pas assez de rétroaction pour pouvoir se hisser à l’échelon suivant!

Selon des études du Harvard Business Review, même s’il est soi-disant positif, le retour d’information donné aux femmes a tendance à être moins concret et moins utile pour l’accès au leadership que celui donné aux hommes, ce qui rend moins probable la progression des femmes vers des postes de dirigeantes.

L’objectif n’est pas de traiter les femmes comme des hommes, mais plutôt d’encourager des pratiques de leadership qui tiennent compte des meilleurs traits traditionnellement féminins et traditionnellement masculins, ce qui pourrait se traduire (en général) par plus de conversations sur les compétences de collaboration avec les hommes, et plus de conversations sur l’affirmation de soi avec les femmes. Des discussions dont tous bénéficieraient.

Il sera impossible de réparer l’échelon brisé et d’offrir aux femmes un meilleur accès à des promotions sans garantir un salaire égal pour un travail de valeur égale. Certes, cela implique une vérification et une réindexation des salaires, mais c’est un investissement à long terme. Si l’on considère qu’une meilleure participation des femmes sur le marché du travail pourrait injecter des milliers de milliards de dollars dans l’économie mondiale, les ressources humaines et les directions d’entreprise devraient se laisser convaincre facilement. 

Au final, aider les femmes à gravir les échelons de l’entreprise, c’est favoriser la réussite de tout un chacun!