Le changement vous fait peur? Les conseils d’Isabelle Hudon
* article mis à jour le 20 mai 2021
«Quand j’ai accepté le mandat, on a décidé de tout vendre à Montréal. Ambassadrice, je ne ferais ça qu’une seule fois dans ma vie. Je voulais le vivre à fond!», se souvient Isabelle Hudon, nouvelle présidente et cheffe de la direction de la Banque de développement du Canada et cofondatrice de L’effet A. «C’était un changement sans commune mesure dans ma vie. Passer du privé à la diplomatie, et vivre à l’étranger… mais je m’y étais bien préparée.»
Le changement, même lorsqu’il est d’une telle ampleur, n’a rien de bien effrayant pour Isabelle Hudon, qui est aussi leader du Défi 100 jours. Elle l’a expérimenté souvent dans son parcours professionnel. Tantôt présidente et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, puis présidente de l’agence Marketel, elle est devenue présidente de la Financière Sun Life au Québec avant d’être courtisée par Justin Trudeau. Est-ce qu’elle a eu peur? «Non. Le changement ne me fait pas peur. Je répète constamment aux femmes d’oser, qu’elles ont toutes un parachute dans le dos. J’y crois réellement! J’ai suffisamment confiance en moi et en mes acquis pour savoir que peu importe ce qui arrivera, je vais retomber sur mes pieds.»
Tout est dit.
Oser le changement avec autant d’aisance n’est pas donné à tous et à toutes, et de multiples freins peuvent expliquer la réticence de plusieurs. Mais parce que le jeu en vaut souvent la chandelle, Isabelle Hudon vous partage ses conseils.
La peur de perdre plus que de gagner
Chaque changement vient avec des pertes et des gains. C’est incontournable! C’est pourquoi il est important de s’arrêter pour prendre la pleine mesure de ce qu’on est prêt à laisser aller… ou pas.
«Partir à Paris n’impliquait pas qu’un changement de vie d’ordre professionnel, mais un changement dans ma vie privée également. Partir avec mon conjoint, Gilles, loin de nos enfants, avait un impact immense sur notre quotidien et a demandé un temps d’adaptation», confie Isabelle. «Puis il y a le travail. Oui, j’adore le privé. Me réveiller chaque matin avec l’adrénaline de devoir gérer la profitabilité d’une entreprise, de respecter des délais serrés… En revanche, jamais le privé n’aurait pu m’offrir un tel défi intellectuel. Toutes ces rencontres, les enjeux diplomatiques, les conversations complexes et variées… Je n’ai jamais connu cette richesse-là. Ce que j’essaie d’expliquer, c’est que bien sûr, il faut peser les pour et les contres avant d’accepter un nouveau mandat. Mais parfois, on ne découvre tous les aspects positifs qu’une fois en place. C’est pourquoi il est important de réfléchir, mais aussi de savoir lâcher prise et de sauter.»
La peur de l’échec
Sur ce point, Isabelle est formelle : la confiance en soi est cruciale pour réussir un changement. «Avant de vous lancer, plutôt que de vous demander “est-ce que j’ai tout ce qu’il faut pour réussir ?”, demandez-vous “aie-je suffisamment confiance en moi et en mes acquis pour m’ajuster à cette nouvelle réalité?”»
Elle insiste sur l’importance de savoir s’adapter. «Dans le privé, par exemple, j’use de mon influence pour rencontrer des objectifs ambitieux et des délais très serrés. Je négocie avec détermination en sachant que je veux atteindre des buts rapidement. En diplomatie, les choses sont différentes. Les jeux d’influences constants ressemblent davantage à une planche de serpents et échelles. On monte un peu, on avance d’un pas, oups!, on recule de trois cases et on remonte…», raconte Isabelle, précisant qu’il faut se montrer ouvert à faire les choses autrement. «C’est une occasion extraordinaire de se développer.»
Le peur du succès — eh oui!
À celles qui craignent que la réussite d’un nouveau mandat résulte en un déferlement de nouveaux défis et donc, de changements, Isabelle répond : «Une chose à la fois!» À titre d’exemple, elle raconte une conversation qu’elle a eue le jour même avec une participante du Défi 100 jours : «Une participante vient tout juste de me confier avoir deux options de nouveaux mandats. Naturellement, elle préférait celui pour lequel elle possède déjà toutes les aptitudes. Je lui ai plutôt suggéré de choisir celui qui la sortira de sa zone de confort. Se mettant en danger, elle apprendra et évoluera bien plus», explique Isabelle. Et si la réussite de ce mandat l’amène à devoir relever de plus grands défis encore? «Fantastique!», lance Isabelle. «Car rendue-là, elle aura acquis une meilleure confiance en elle, et elle aura beaucoup moins peur de relever de nouveaux défis.»
Le risque d’être imparfaite
«Et puis? Personne ne vous demande d’être parfaite», soutient la leader. Et elle n’a pas tort… Les grands perfectionnistes manquent souvent d’authenticité et dépensent beaucoup trop de temps et d’énergie sur des détails pas très importants.
«Personnellement, je me jette souvent dans le vide en acceptant d’apprendre DURANT le parcours plutôt qu’AVANT. Je pense entre autres à un traité de libre-échange qui m’a été confié… Pour comprendre parfaitement cet enjeu, il m’aurait fallu de 6 à 8 mois! Je ne me voyais pas perdre ce temps précieux. Le jour 1, j’ai donc demandé à rencontrer les acteurs impliqués dans le dossier. Je n’ai pas beaucoup parlé lors de ces réunions. J’étais en mode écoute. Je me suis lancée dans cet apprentissage avec beaucoup d’humilité. Je pense que si j’avais visé la perfection, je n’aurais pas appris si rapidement, et surtout, je n’aurais pas découvert le côté humain de la chose.»
La crainte de perdre son réseau, ses alliés, ses amis
«On ne perd pas un réseau ; on l’élargit», affirme la leader. «Arrivée à Paris, j’ai été surprise de la rapidité à laquelle des gens se sont ajoutés à mon cercle de connaissances. À peine six mois après mon entrée en poste, j’avais déjà rencontré individuellement plus de 350 élus, dont des sénateurs, des chefs syndicaux, des leaders de la scène culturelle…», confie celle que surnomment certains médias «l’ambassadrice de choc». «Je suis déjà reconnue pour mon franc-parler, et ça ne me dérange pas. Je demeure qui je suis et je vais à la rencontre des gens en toute authenticité.» Et pour celles qui auraient peur de perdre leurs «anciens» complices, Isabelle répond qu’un réseau se solidifie au fil du temps, à condition de savoir l’entretenir.
Oser le changement, c’est gagner
«On a toutes un parachute dans le dos», répète Isabelle. Et elle a bien raison. Si oser le changement donne parfois le vertige et que l’atterrissage ne se fait pas toujours en douceur, on n’en sort jamais vraiment perdante. Dans le pire des scénarios, on se relève, on ramasse les aptitudes et connaissances qu’on a développées en route, et on poursuit notre chemin.
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